Equipe Nationale

Tapha Diallo : «J’avais du mal à comprendre mes non-sélections au moment où j’étais au top»

«J’avais du mal à comprendre mes non-sélections au moment où j’étais au top», disait-il quand on lui a posé la question de savoir ce qui expliquait sa non-présence en équipe nationale. De ses non-sélections à sa retraite forcée par une blessure qui a mis fin à sa carrière, Moustapha Diallo est revenu sur ses débuts, son parcours et sur la CHAN 2009 qui l’a révélé au grand public, mais surtout sur sa belle carrière en France et sa reconversion.

Malgré ses belles prestations avec Guingamp en Ligue 1, Moustapha Diallo est resté zappé depuis toutes ces années. Une équation qu’il a toujours cherché à résoudre, puis que les qualités et les statistiques plaidaient en sa faveur à une certaine époque. « Je trouve paradoxale le fait que je ne sois pas en équipe nationale A quand je suis devenu un footballeur plus mature avec beaucoup de matchs et des buts marqués en Ligue 1 française et des matchs de Coupe d’Europe alors que j’y étais quand j’étais encore un joueur local, au Jaraaf. », s’est demandé le jeune ambassadeur de l’En Avant de Guingamp qui rappelle avoir suivi des Coupes d’Afrique « où il se voyait bien dans la liste de la sélection nationale », rajoute-t-il. « Et s’il y a un regret dans ma carrière, c’est de ne pas pouvoir apporter ma contribution dans les performances de la sélection au moment où j’étais à mon meilleur niveau. »

Footballeur à la retraite, Tapha a fini sa carrière dans un poste où il n’évoluait pas au début de sa carrière. Milieu box to box, le sénégalais n’oublie pas ses premiers pas dans le monde du football. « J’ai démarré comme libéro (Ndlr : défenseur central), avant de me retrouver au milieu de terrain, grâce à Mohammed Mendy (Ndlr : son coach en junior au Jaraaf). Il m’avait fait entrer en jeu au poste de milieu de terrain face à Ngor. Je me souviens avoir fait une belle prestation. J’avais même marqué comme ce fut le cas à Monaco avec presque le même geste. C’est comme ça que l’appétit du milieu de terrain m’est venu.

Mais en cadet, je jouais dans l’axe de la défense avec un ami avec qui j’étais très complice et qui s’appelait Cheikh Mbacké. On s’entendait tellement qu’on ne prenait pas beaucoup de buts. A l’école pendant les matchs d’inter-classes ou d’inter-écoles, je jouais comme ailier et j’étais bon. J’avais les qualités pour évoluer dans les différents secteurs de jeu et pour moi, c’était important que je le fasse parce que j’apprenais. », souligne-t-il.

DES DÉBUTS DIFFICILES…

« J’avais commencé dans les rues comme tous les jeunes footballeurs sénégalais de mon âge. Quand j’avais commencé à découvrir que j’avais les qualités pour aller plus haut et plus loin, je suis parti intégrer l’équipe cadette du Jaraaf qui s’entrainait à l’école Médine, où je me suis retrouvé chez les juniors plus tard.

En U20 au Jaraaf, c’était très compliqué au début. J’étais en classe de 5e à l’école et je pratiquais donc les études en parallèle avec le football. Il m’était arrivé le moment de choisir entre les études et le football, et j’avais décidé de me consacrer sur le football. Une décision qui était difficile à prendre parce que ma famille s’y était totalement opposée.

Je m’entrainais en séchant les cours. Je prenais le bain chez Cheikh Mbacké pour que mes parents ne comprennent pas. Pendant les grandes vacances, je jouais en senior à l’ASC Ngaraaf où j’évoluais en cadet quelques années auparavant. Et l’année d’après, je me suis imposé chez les juniors du Jaraaf en tant que titulaire.

J’avais fait une belle saison et c’est là que les dirigeants du Jaraaf ont commencé à me prendre au sérieux. Surtout que j’avais un entraineur (Ndlr : Mohamed Mendy) qui me faisait croire que j’étais dans une génération qui avait les qualités pour jouer en première division. »

SES DÉBUTS EN LIGUE 1 SÉNÉGALAISE AVEC JARAAF…

«Au Jaraaf, j’avais intégré l’équipe quand il y avait eu la grève des joueurs de l’équipe A. Je me souviens que les anciens comme Pape Ciré Dia (Ndlr : ex-international sénégalais) me demandaient le jour de mon premier entrainement avec eux, s’il y avait une rencontre des juniors. Ils ne savaient pas que j’étais convoqué.

Lamine Dieng (Ndlr : coach du Jaraaf de l’époque) m’avait fait entrer en jeu contre l’AS Saloum et j’avais délivré à Oumar Traoré, la passe décisive du troisième but (3-0). On part à Diourbel, et on fait match nul. Le Président avait appelé Yatma Diop (Ndlr : ex-dirigeant du Jaraaf et ancien international sénégalais) pour lui dire si on avait fait zéro but partout (0-0), c’est en partie grâce à moi.

C’est là qu’un français qui était venu suivre Ndéné m’a repéré après un seul match. Il m’avait amené à Stuttgart, où Giovanni Trappatoni (Ndlr : ex-sélectionneur de l’Italie) était coach. Vu qu’il était un ancien défenseur et il aimait avoir un joueur défensif qui avait de la rigueur dans son jeu, il était très vite tombé amoureux de mon profil.

Schalke 04 avait aussi voulu me faire effectuer des essais. Le Jaraaf ne voulait pas que je signe parce qu’il pensait faire un bon coup, puis que j’étais jeune et je pouvais mieux leur apporter. Je suis donc rentré au Sénégal et Pape Diouf est venu me trouver là-bas. Yatma Diop lui avait dit de me faire effectuer des essais à l’Olympique de Marseille (2005), où je suis parti trouvé des amis comme Leyti Ndiaye (ex-international sénégalais).

On était parti à Bayonne pour le stage d’avant saison avec l’OM. Mais c’était très dur. Je me souviens que je pouvais même dormir dans les toilettes à cause de la fatigue. Les entrainements étaient très intenses. Peu après, je tombais malade et j’avais préféré rentrer au Sénégal pour retourner après. »

LA POLÉMIQUE SUR SON RETOUR AU SÉNÉGAL…

«A mon retour, je reprends la compétition avec le Jaraaf. L’agent revient me proposer 2.000 euros, afin que je lui donne mon accord pour aller effectuer des essais en Belgique. J’avais accepté parce que cette somme pesait à l’époque et je ne pouvais pas le refuser. Je suis donc parti à Bruges, où les dirigeants sont tombés d’accord avec mon entourage. J’étais parti au mois de Mai et je me souviens que j’y étais avec Me El Hadji Diouf.

Le coach qui m’avait fait venir s’était fait virer. Son remplaçant est arrivé dans une période où j’avais une luxation d’épaule et il ne m’avait pas fait pas de cadeau, surtout que j’étais très jeune à cette époque. Il avait dit qu’il ne comptait pas sur moi. Une équipe de Ligue 2 m’avait sollicité et Bruges avait aussi refusé de me laisser partir.

J’avais fini par résilier mon contrat pour rentrer. Mon oncle voulait que je le rejoigne à Paris, mais je lui avais fait savoir que j’avais 20 ans et que je pouvais rentrer au Jaraaf, bosser dur et tenter de revenir à nouveau. J’étais confiant et je savais que je pouvais le faire, mais c’était compliqué parce que les gens n’avaient pas compris ce choix.

Mon oncle, oui, il avait compris que si je partais à Paris où je n’avais pas de séjour, ma situation allait se compliquer, mais les gens au Sénégal s’en étaient trop mêlés . Les critiques étaient là à chaque fois parce que pour eux, je ne voulais rien. Ma maman avait commencé à prendre leurs critiques au sérieux, mais je l’avais rassuré, à ne pas s’inquiéter à cause de la pression des gens. J’avais acquis de l’expérience et je savais que j’avais les qualités pour faire une bonne saison et retourner en Europe et de réussir. »

LE CHAN ET LE DÉPART VERS GUINGAMP

«Mon retour avait coïncidé avec la première édition du premier Championnat d’Afrique de Football (Ndlr : CHAN 2009). Je venais de découvrir Thierno Seydi (Ndlr : agent de joueurs) dont la sœur était une ex-coéquipière à ma mère en Athlétisme. Lors de la compétition, plusieurs équipes étaient venus superviser des joueurs locaux parce que la compétition n’étaient destinés qu’aux joueurs évoluant dans leurs pays.

Guigamp avait ses émissaires qui avait contacté Thierno et l’offre était la bonne avec les conseils de mon agent qui m’avait fait comprendre que c’était un club de famille et que j’allais me sentir bien là-bas. J’ai donc débarqué en Ligue 2 (Guingamp) et le club avait fini par descendre en National. C’était difficile, mais j’avais décidé de rester là-bas. Ma femme venait d’arriver et puis mon fils venait de naitre aussi. Cela m’avait poussé à rester avec l’arrivée de Jocelyn Gouvernec qui a été bénéfique, puis qu’il m’avait responsabilisé dans son projet.

Guingamp reste une bonne expérience. Ma première année en Ligue 1 a été très importante, car, on avait gagné la Coupe de France avec la qualification en 8e de finale de la Coupe de l’UEFA. Un vécu qui m’a rendu fier parce que c’était un objectif atteint. Il faut savoir que le football n’est pas facile.

Il faut donc être endurant et croyant, tout en s’entrainant et en respectant également les enseignements des entraînements, préservant son hygiène de vie et tout ce qui peut te rendre performant. Il faut surtout être compétitif, ne pas se contenter des entraînements de son équipe, chercher à être en jambe et à surtout travailler ses lacunes en individuel.

LE CHOIX DE NÎMES OLYMPIQUE

«Je voulais finir ma carrière à Guingamp, le club qui m’avait permis de commencer en Ligue 1. Il ne me restait plus beaucoup d’années dans le football, mais ma deuxième année avec Antoine Kombouaré n’avait pas été facile. A son arrivée, je l’avais rassuré par rapport à mon engagement à vouloir lui faire montrer que je voulais qu’il réussisse et que j’étais prêt à me donner à fond. Mais l’année d’après, il a un peu changé sa façon de faire dans l’équipe. Il prenait des décisions que je ne comprenais pas.

J’étais parti dans son bureau discuter avec lui et il m’avait fait savoir qu’il ne comptait plus sur moi et il l’avait fait savoir au Président. Ce dernier était devant le fait accompli parce qu’il s’était trouvé dans l’obligation de faire un choix entre le coach et moi. Vu que j’avais des sollicitations en Turquie et dans d’autres clubs en France, j’avais choisi Nîmes Olympique parce que la Turquie ne me chantait pas trop et la proposition de Nîmes était intéressant. Malheureusement, je me suis blessé et voilà comment les choses se sont passées. »

SA BLESSURE / LA FIN DE SA CARRIÈRE…

«À Guingamp, je ne jouais qu’un seul match par semaine pour éviter que la cheville s’enflamme. Je ne pouvais pas enchainer les rencontres pour mieux me sauvegarder physiquement. À Nîmes, je l’avais fait comprendre au coach. On avait un match de championnat contre Guingamp. La rencontre devait se tenir le Samedi et j’avais dit au coach que soit joue face à Guingamp ou le prochain match contre Montpellier.

Le coach m’avait dit qu’il préférait que je joue contre Guingamp parce que même si Montpellier était un derby, c’était un match à l’extérieur. Le coach était revenu pour me demander de participer à cette rencontre parce que la situation demandait à ce que je joue et que la presse disait même que si je ne jouais pas, les risques de perdre le match était là. Je m’y étais opposé, mais il m’avait demandé de jouer. On avait joué et à la mi-temps, je n’arrivais plus à me lever de là où j’étais assis. Je ne pouvais plus marcher et cela m’avait étonné.

Le coach avait fini par effectuer un changement. J’étais parti suivre un spécialiste et il m’avait fait savoir que c’était fini, que je ne devais pas prendre de risques, à défaut de ne plus marcher correctement à un certain âge, car prendre ce risque me privera de jouer quand je serai encore plus âgé, avec les enfants et mes amis.

J’étais parti voir des spécialistes jusqu’à Marseille, y compris ceux avec qui mes agents m’avaient mis en rapport. Ils m’avaient tous donné la même conclusion : que c’était fini. Mais je rends grâce à Dieu. Oui, c’était compliqué de voir que sa carrière allait s’arrêter d’un seul coup, après avoir signé un contrat de deux ans dans un nouveau club. J’avais discuté avec ma famille et mes amis. J’avais fini par accepter parce que j’avais joué et réalisé de bonnes choses depuis 2003. Si ceci m’arrive vers la fin de ma carrière, j’en rends grâce à Dieu. »

SÉLECTION LOCALE / SES NON-SÉLECTIONS EN EQUIPE NATIONALE A

«C’est après mon match de Champions League avec le Jaraaf que j’avais appris que l’équipe nationale A’ m’avait sélectionné, sous Guy Stephan, Amara Traoré et Abdoulaye Sarr. J’étais très content, très franchement. J’avais toujours été un international local quand j’évoluais au Sénégal. J’ai eu 6 sélections, mais toutes quand j’étais encore au Jaraaf. Ce qui est bizarre, c’est que j’étais un joueur local et je jouais titulaire (en équipe nationale A).

Contre la Corée, j’étais le meilleur joueur sénégalais sur la pelouse. Quand je suis devenu un joueur professionnel, je n’ai plus été sélectionné en équipe nationale alors que je joue dans le haut niveau français et je joue aussi la Coupe d’Europe, marquant également des buts. J’avais suivi des Coupes d’Afrique auxquelles je me sentais dans l’équipe. Quand je regarde la Zambie qui avait remporté la CAN avec Hervé Renard, c’est presque la même qui était venue à la CHAN que j’avais joué quelques années avant. Voir que pendant ce temps-là, je ne pouvais pas aller en sélection a été un grand regret.

SON AVIS SUR LA SÉLECTION NATIONALE ACTUELLE

«Cette génération est la meilleure en Afrique. Il faudra qu’elle y croit plus que celle de 2022 parce que cette dernière avait des joueurs qui était très hargneux. On a aujourd’hui, des joueurs comme Idrissa Gana Gueye, Sadio Mané, Kalidou Koulibaly qui sont très bons et ils doivent se donner encore plus. Il faut juste continuer à y croire et cette génération doit gagner quelque chose pour le pays. », a fait savoir Tapha Diallo.

POURQUOI LE CHOIX DE RENTRER AU SÉNÉGAL

«Je suis un sénégalais, pas français. Je n’étais pas pas parti en Europe pour y habiter, mais pour y travailler. Quand j’avais vu que ma carrière de footballeur était finie, j’avais décidé de rentrer parce que je ne pouvais pas rester là-bas. Je suis revenu parce que je veux aider les jeunes sénégalais à profiter de mon expérience et de mes relations professionnelles. Je ne suis pas très intéressé par le métier d’entraineur qui demande trop de pression et de patience, et je ne les ai plus. Je préfère être dans la détection des jeunes talents parce que je me sens plus à l’aise dans ce domaine que dans d’autres, vu mon expérience en plus.»

ÊTRE DIRIGEANT DU JARAAF

«Le Jaraaf est un grand club, dirigé par des anciens qui m’ont vu grandir et j’ai beaucoup de respect pour eux. Je ne peux pas me lever du jour au lendemain et dire que je vais devenir dirigeant du Jaraaf. Je viens de créer mon académie. Le projet est de l’affilier à Guingamp. Après, on peut travailler avec le Jaraaf dans le futur. Vu que je suis encore jeune, je préfère apprendre en attendant, voir si je pourrai très prochainement intégrer le Jaraaf comme il y a déjà mes aînés comme Ciré Dia, Mansour Ayanda etc., qui y sont. C’est mon équipe et je pourrai le rejoindre un jour et pourquoi pas me retrouver dans la fédération aussi parce que les jeunes ont besoin de notre expérience.

Si par exemple, la sélection nationale était entourée de beaucoup d’anciens joueurs, je pense que les choses allaient être autre. C’est pourquoi je dis que nous les anciens internationaux, nous devons aider les jeunes. », a rappelé Moustapha Diallo qui avance que son académie finira par élargir ses bases le moment venu. Mon académie (Ndlr : Mame Fallou Academy) vient de voir le jour.

Pour l’instant, on a préféré prendre les jeunes de notre quartier, vu les moyens dont on dispose. Tout se fait étape par étape. Mais le moment venu, on fera de la détection dans tout le Sénégal pour voir d’autres profils et prendre les meilleurs. », a conclu l’ambassadeur accrédité de l’En Avant Guingamp.

Chérif Sadio

Reporter indépendant.

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