Equipe Nationale

Amara Simba : «Pourquoi je n’ai pas joué pour le Sénégal ?»

Des terrains sablonneux de Dakar au Parc des Princes, Amara Simba a dû se tracer un chemin pour devenir la légende qu’il est depuis ses débuts dans l’élite française. Si la roulette est tamponnée au nom de Zinedine Zidane, la reprise de volée restera quand bien même une spécialité de l’ancien joueur de la Jeanne d’Arc de Dakar.

Son nom restera à jamais associé à la bicyclette, le geste en vogue dans les années 80 – 90. Ailier polyvalent, Amara Simba alliait technicité et rapidité dans son jeu. De ses qualités de vitesse à son instinct de buteur, l’ancien attaquant du Paris Saint-Germain (Ndlr : de 1089 à 1993) a marqué son époque, grâce à son but d’anthologie. De quoi taper dans l’oeil de l’équipe nationale de France. Aujourd’hui à la retraite, Simba est de la vague des footballeurs d’origine africaine qui ont aussi écrit l’histoire du club de la capitale française à son époque.

De parents guinéens, Amara est né à Dakar, où il a grandi. Comme la plus part des jeunes sénégalais, il a commencé à taper au ballon dans les rues et ruelles de la capitale sénégalaise.

Il a démarré une carrière structurée à la Jeanne d’Arc (Ndlr : équipe de première division au Sénégal dans les années 90 jusqu’aux années 2010), avant de quitter le Sénégal pour la France, où il deviendra un international en 1991. « Je suis arrivé en France à l’age de 20 ans pour m’engager dans l’armée. Il faut savoir que mon papa fut un ancien militaire dans l’armée française.

Je suis par la suite sorti de l’armée pour m’engager dans un club amateur à Houdan (Ndlr : Football Club Region Houdanaise), puis au Racing Club de Versailles. J’ai passé quatre (4) ans dans les divisions amateurs et jusque-là personne n’était venu me chercher. », a révélé l’ami à Jules François Bocandé, son « frère » avec qui il a gardé de très bons rapports, dit-il.  L’ancien attaquant de l’AS Cannes n’a pas pu retenir ses larmes quand la question de revenir sur qui était « Essamay » lui a été posée.

« Je définis Jules (Ndlr : Jules François Bocandé fut l’ancien capitaine du Sénégal) comme un Lion. Avant de venir à Paris, on voyait sa façon de jouer et toute la force qu’il dégageait sous les couleurs du FC Metz (Ndlr : club avec lequel Bocandé a été meilleur buteur du championnat de France en 1986). Une fois au PSG, j’ai découvert l’homme qu’il était. Nous nous sommes fréquentés et nous avons eu pas mal de bons moments avec lui.

Humainement, c’était quelqu’un qui… (il hésite et coupe), c’est rare de voir une telle personne. Nous avions joué à l’étranger et ce sont des choses qui marquent une vie.

Il y avait aussi Oumar Guèye Sène qui était avec nous comme capitaine du club. Deux personnalités à très forts caractères. Nous nous retrouvions dans la vraie identité sénégalaise à l’époque. » s’est souvenu l’enfant de la SICAP Rue 10.

Spécialiste de la bicyclette, Simba était un vrai génie. L’ancien monégasque n’avait pas besoin de passer des heures d’entraînement pour maîtriser ce geste si impressionnant qui a marqué son époque : « à la Amara Simba », disaient les reporters à chaque fois qu’un footballeur marquait de la sorte. La bicyclette, je le faisais en Guinée. Ce sont des choses qui forment le corps et pour le faire, il te faut une certaine souplesse. 

Ma première ? C’était contre Mulhouse et tout est parti de là avec les publicités. On était sur un terrain glissant et quand le ballon arrivait, je sentais déjà mon corps, puis j’ai fait le geste.

Quand j’ai vu l’engouement et les questionnements qu’il y avait autour de ce but avec certaines personnes qui disaient qu’il n’a “pas fait exprès”, je me suis dit “mais attends, c’est naturel ça (rires) “, se rappelle l’ancien coéquipier de Zinedine Zidane.

Prêté à l’AS Cannes, Amara en a profité pour exploser et montrer de quoi il était vraiment capable. Avec Zidane qui était à ses débuts, Amara s’était régalé. J’étais prêté à Cannes et il y avait Zinédine Zidane qui faisait ses débuts en première division, dit-il.

Une période pendant laquelle Patrick Vieira et Johan Micoud étaient encore au centre de formation. On avait réalisé une série de 13 matchs sans défaites. Et Zidane était dans l’équipe, on avait même joué contre le PSG et je leur avais mis une bicyclette. »

Etre un génie se distingue à travers une personne qui se démarque de façon exceptionnelle de ses contemporains par un talent hors du commun, voire par une aptitude créatrice extraordinaire, notamment dans le domaine artistique, apprend-on. Oui, Amara Simba était un artiste du ballon.

La bicyclette n’est pas un geste pour lequel je m’entraînais. C’était naturel en moi. Et c’est arrivé à une période importante parce que Thierry Roland et Jean Michel Larqué étaient là et c’étaient les débuts de la chaîne TF1 qui venait d’initier le « Prix du but de la saison » que j’ai remporté trois (3) fois.

Je mettais très tôt les bicyclettes (rires) comme ça personne ne faisait plus que moi (rires). » En équipe nationale, j’ai débuté à presque 30 ans. Ma première sélection, c’était en Pologne, ma deuxième au Parc face à l’Islande puis à Wembley contre l’Angleterre.

J’avais même mis une bicyclette lors de ma deuxième sélection (Victoire 1-5 de la France, remportée le 14 Août 1991). J’ai par la suite été sélection pour l’Euro 92, où je devais jouer dans une attaque avec Eric Cantona et Jean-Pierre Papin. », nous raconte la légende du PSG.

Fils d’un ancien combattant, le jeune Simba a aussi fait le service militaire dans l’armée française. « Je suis né à Dakar puis je suis parti en Guinée, le pays de mes parents. Je suis revenu à la SICAP Rue 10 (Ndlr : un quartier populaire de Dakar) quand j’avais 13 ans. J’ai commencé à jouer avec les amis et c’est comme ça que j’ai par la suite intégré la Jeanne d’Arc qui était avec le Jaraaf, les clubs les plus structurés du Sénégal à l’époque.

La JA est un grand club et même quand je suis arrivé en France, c’était ma référence. Ce qui m’a le plus frappé, ce sont mes amis d’enfance dans le quartier, ils étaient de bons amis. Il m’était arrivé un moment où je devais faire le choix entre le football et le basketball parce que j’étais très adroit aussi dans le basketball. », poursuit-il.

Attaché à son pays de naissance et à la Guinée de ses parents, Amara Simba n’oublie pas d’où il vient et comment il a pu se donner à fond pour arriver au sommet du football mondial. « Je suis arrivé à PSG en tant qu’amateur à 25 ans, puis j’ai signé mon contrat pro trois ans après avoir avoir réussi des tests, notamment lors du match contre Bordeaux. Jusque-là le Sénégal ne m’avait pas appelé et j’avais 28 ans, se souvient-il.

Rapide et bon dans les courses, Simba était un footballeur qui aurait pu évoluer avec les Lions. L’on se demande même comment le Sénégal a-t-il pu laisser filer ce prodige à une époque où le pays avait une génération dorée ? On n’était pas dans le registre de suivre les joueurs qui évoluaient à l’extérieur afin de pouvoir leurs empêcher de jouer pour d’autres sélections.

Pour Amara : tout a démarré contre Marseille, où j’avais marqué pour ma première titularisation et il y avait Michel Platini (Ndlr : sélectionneur de l’équipe de France) dans les tribunes. Il n’a pas hésité à m’appeler. Ma première sélection est arrivée dans les trentaines et je ne me souviens pas que le Sénégal ou la Guinée était venu me chercher.

Le PSG avait recruté de grands joueurs dont le meilleur buteur du championnat qui était Jules Bocandé. Il y avait aussi Vahid Halilhodzic, Dominique Rocheteau et moi j’arrivais de Versailles en amateur. Je découvrais tout un monde nouveau en fait. », conclut l’ancien attaquant d’Arsène Wenger à Monaco.

Après sa retraite, Simba s’est reconvertit recruteur puis entraîneur adjoint. Il a d’abord travaillé en tant que recruteur pour le PSG en 2004 tout en étant consultant à Canal+, partenaire du club de la capitale. Trois ans plus tard, Paris se lance dans la conquête des footballeurs africains. Et Amara se voit confier le poste d’ambassadeur l’Afrique.

Son retour en Guinée débutera en 2014, où il devient directeur sportif du Club Industriel de Kamsar (Ndlr : Ligue 1 Guinée). Un an plus tard, il occupe le poste d’assistant de Fernandez en compagnie de son ami, Kaba Diawara. A la démission de l’ancien coach du PSG, Amara se retire et vit désormais sa retraite entre la France et son Afrique.

Chérif Sadio

Reporter indépendant.

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