Pape Thiaw : «J’ai fait mieux que la talonnade face à la Suède»

L’ancien international sénégalais et actuel coach du NGB, a répondu en direct à nos questions, à travers notre compte Instagram. L’occasion pour lui de balayer de nombreux sujets, et d’évoquer notamment son passage de Saint-Etienne, à Lausanne-Sports (Suisse), mais aussi sur l’équipe nationale. «Je n’avais jamais joué le championnat professionnel sénégalais auparavant, j’ai juste joué les championnats de quartier “Navétanes”».
 
Pape Thiaw est de la vague des footballeurs sénégalais parti du Navétane pour intégrer un club professionnel européen. A l’image de la plupart des joueurs de Grand-Dakar, l’ancien messin a commencé sa formation dans les rues de sa ville. « J’ai très tôt commencé à jouer au football. J’avais la chance d’avoir les qualités d’un joueur africain en plus de cela, j’avais une petite touche de foot européen, grâce à ma préformation dans des écoles de foot et mon passage au centre d’Aldo Gentina qui avait une bonne réputation et qui est l’équivalent de ce que sont Génération Foot ou Diambars FC. », raconte Thiaw.

Malgré le talent du jeune Pape, le chemin de l’Europe se conjuguait toujours au conditionnel.Il fallait donc taper dans l’œil du grand dirigeant Abdoulaye Touré, ancien collaborateur de l’AS Saint-Etienne pour tenter son aventure en France. J’ai eu la chance de rencontrer Touré (ndlr : Président Yeggo) qui m’a vu jouer et m’a promis de m’emmener à Saint-Etienne. Il m’a demandé de lui faire confiance et de continuer à bien travailler avec lui. », dit-il.  C’est comme ça que j’ai quitté le Sénégal pour rejoindre la France, où j’ai rejoint le centre de formation de l’AS Saint-Etienne comme convenu. Je n’avais jamais joué le championnat professionnel sénégalais auparavant. J’ai juste joué dans le Navétane (Ndlr : championnats inter-quartiers, organisé pendant la période des vacances). », révèle l’ancien joueur d’Alavés.

Le football français pour ne pas dire celui de la France uniquement a connu une période assez compliquée pour les joueurs étrangers. L’arrêt bosseman, une loi qui n’autorisait pas aux clubs d’avoir un certain nombre d’étranger avait freiné la progression de plusieurs starlettes du continent noir. La chance du jeune attaquant sénégalais était peut-être le fait d’avoir sous sa protection, son compatriote et agent, l’ancien Président de Marseille, le regretté Pape Diouf.

«Pape Diouf mettait la pression aux dirigeants stéphanois »

« Avant l’arrêt bosseman, j’étais le seul joueur étranger de l’ASSE. Après la montée en première division, il y a eu de nouvelles recrues et le club m’a alors demandé de m’entrainer avec les pros mais que le weekend je devais jouer avec la réserve. Moi, je me suis dit que mieux vaut être grand parmi les petits que d’être petit parmi les grands. J’ai était prêté au FC Istres ou malgré des débuts compliqués, j’ai fait une très bonne saison. », révèle Pape qui était encore sous-contrat avec les verts. A la fin de mon prêt je retourne à Saint-Etienne, et Pape DIOUF qui était mon agent à l’époque, met la pression à la direction stéphanoise pour leur demander soit de m’intégrer dans le groupe professionnel ou de me libérer. », se souvient-il.

Un ras-le-bol du dirigeant sénégalais qui a été un grand tournant dans la carrière du jeune ailier. «C’est ainsi que j’ai rejoint le club de Lausanne en Suisse, où j’ai joué la coupe d’Europe jusqu’en ¼ de finale en éliminant l’Ajax Amsterdam. C’était un beau passage à Lausanne. », rajoute-t-il.

International sénégalais, présent des éliminatoires à la Coupe du Monde, où les Lions ont été freinés en quart de finale, après une place de finaliste de la Coupe d’Afrique. Jusque-là méconnu du grand public, Pape Thiaw se fera connaitre un peu plus après sa belle prestation face à la Suède, en huitième de finale de la grand-messe du football mondial en Corée et au Japon. Une talonnade à Henri Camara qui met à terre toute la défense de la formation de Zlatan Ibrahimovic. Quand l’adage dit qu’un geste suffit pour résumer une carrière, c’est peut-être à cause de la réalité que connait aujourd’hui Pape Thiaw après sa passe exceptionnelle pour l’ancien buteur de Wigan.  

La talonnade contre la Suède, pas son meilleur souvenir

« La talonnade face à la Suède ? Elle est devenue une image de marque. Les gens ne se souviennent que d’elle alors que j’ai fait mieux que ça. Ils oublient même mon doublé contre la Namibie, ce match mémorable qui nous a permis de nous qualifier à la Coupe du monde 2002 », nous rappelle-t-il.Puisqu’il a évoqué le match contre la Namibie, Pape Thiaw nous raconte une sacrée anecdote de la tanière. « C’est un match bizarre. Deux (2) semaines avant, on avait joué contre le Maroc à Dakar et on avait fait une belle prestation collective. », se souvient-il.

«Comme on dit, on ne change pas une équipe qui gagne. Sachant que je n’étais donc pas titulaire lors du match précédent, je croyais que le coach allait faire jouer la même équipe contre la Namibie J’avais un peu “les boules” la veille, car j’étais persuadé que je n’allais pas jouer, jusqu’au moment où Jules François Bocandé à toqué à la porte de ma chambre pour me dire que je figurais dans le 11 de départ. », se rappelle l’ancien messin.

Surpris de sa titularisation lors de ce match si hautement important, Pape prend ses engagements, sa responsabilité et se tient également prêt mentalement et physiquement. «Je me sentais vraiment en forme ce jour-là. Pendant la préparation d’avant match des attaquants, j’avais mis 10 balles dans la lucarne avec 100% de réussite. J’étais ému ce jour-là. On avait joué à 13 heures, pratiquement à l’heure du repas. Je me disais que c’est grâce à moi que les sénégalais ont fini par prendre leurs repas ce jour-là (rire). C’était un match décisif, où tout le monde était sous pression », nous raconte Thiaw. On a fait un vrai travail d’équipe et c’est l’un de mes meilleurs souvenirs en équipe nationale ».

Le rôle important des sélectionneurs…

La concurrence aux postes d’attaquants étaient âprement disputée. Des indéboulonnables milieux de terrain au duo intouchable magique composée d’El Hadj Diouf et d’Henri Camara, l’effectif de Bruno Metsu s’affichait comme l’un des plus riches en Afrique. Qui de mieux placé que Pape Thiaw, avec le recul, pour juger le travail d’un sélectionneur, en plus d’être un entraineur aujourd’hui ? « C’est difficile d’être sélectionneur. Vous devez regrouper des joueurs titulaires dans leurs clubs et tout faire pour faire digérer à certains qui n’ont pas l’habitude de se retrouver sur le banc de touche. Chapeau aux sélectionneurs ! Et j’en profite pour saluer le travail du grand frère Aliou Cissé qui fait un bon travail avec les Lions. », a fait savoir le coach de Niarry Tally Grand-Dakar et Biscuiterie.

Différence entre le football européen et le football local

« Déjà, ce n’est pas le même contexte économique. Le foot sénégalais est en progression à l’image de nos équipes en petite catégorie qui font parties des meilleurs en Afrique. En Europe, les équipes misent beaucoup sur les jeunes joueurs alors que chez nous, les jeunes peuvent s’entraîner toute une saison sans jouer. », se désole-il. Heureusement qu’il y existe beaucoup de centres de formations et des coachs qui osent faire jouer des jeunes dans leurs équipes ».

La solution à ce problème ….

Pour régler ce problème, le jeune technicien pense qu’il faut réformer les règlements du championnat. Il devrait être imposé à « Chaque club d’intégrer 3 jeunes joueurs dans la feuille de match de chaque journée » avant de poursuivre « et pourquoi ne pas intégrer de façon obligatoire un jeune joueur dans le 11 de départ lors des matches. Ainsi, les jeunes pourront gagner en expérience. Ils en profiteront pour découvrir le football adulte et cela nous permettra de lutter contre la fraude sur l’âge dans le foot », suggère-t-il.

Le but, son obsession …

Marquer des buts, c’est toujours positif pour un attaquant. Cela apporte de la confiance et une certaine sécurité. Ça, Pape Thiaw en était conscient : « J’avais toujours la rage de marquer des buts, à l’entraînement comme dans les matchs officiels, j’étais obsédé par le but. Le coach avait son 11 et je n’en faisais pas forcément partie, un choix que j’ai toujours respecté. Je n’étais pas comme El hadji qui pouvait rater un match et rejouer le match suivant, moi je n’avais pas cette chance et j’en étais conscient. C’est la raison pour laquelle que je donnais tout à l’entrainement comme lors des matches. », nous raconte-t-il.

Après Metz, Pape a aussi porté les couleurs du Racing. Mais comment le Lio s’est retrouvé sous les couleurs de la formation bleu et blanche ? « Vous savez pourquoi j’ai signé à Strasbourg ? C’est grâce à Habib Bèye. Il était tellement fan de ma façon de jouer qu’il à demander à Marc Keller de me recruter. C’est ce que j’ai fait. Je l’ai rejoint et on est monté ensemble en Ligue 1, puis on est devenu champion de France. Lamine Diatta aussi avait tout fait pour que je le rejoigne à Rennes, mais ça ne s’est malheureusement pas fait », a conclu le jeune entraineur.