Lions en Club

Assane Mbodj (Jaraaf) : «Pourquoi j’avais résilié mon contrat en Finlande»

L’international sénégalais est revenu sur ses essais en Europe, sur son contrat résilié en Finlande, sur sa saison actuelle avec le Jaraaf de Dakar et sur ses ambitions. Bref, c’est un Assane Mbodj à cœur ouvert qui a répondu à nos différentes questions dans un long entretien qu’il nous a accordé.

Natif de la Médina (Ndlr : un des quartiers le plus populaire de la capitale, Dakar), Assane Mbodj a entamé sa carrière dans les rues de son quartier, avant de faire ses débuts dans le Navétane (Ndlr : tournoi inter-quartiers dans les villes et villages du Sénégal, organisé pendant les grandes vacances) pour ensuite suivre une formation à Dakar Sacré Cœur, nous dit-il. « J’ai débuté ma carrière de façon un peu plus structurée à l’ASC Santhiaba de la Médina en cadet, avant d’aller à Dakar Sacré Cœur pour mon cursus cadet, junior et senior. C’est de là-bas que je suis parti pour le Jaraaf de Dakar. »

Champion du Sénégal (2018) avec le Jaraaf, Assane Mbodj n’est qu’à un pas de la sélection nationale A du Sénégal. L’attaquant du Jaraaf a joué dans presque toutes les catégories du pays de Sadio Mané. Ma première sélection locale date de 2016, face à la Mauritanie. J’ai aussi enchaîné contre le Mexique. L’équipe A ne pouvant pas s’y rendre, les locaux y avaient pris part et je faisais partie des sélectionnés. L’année dernière, j’ai remporté avec la sélection locale, la Coupe des Nations Ouest-Africaine (UFOA). », rappelle Assane, ciblé par Aliou Cissé. J’ai déjà eu des discussions avec Aliou Cissé.

Il m’avait appelé avec Momo Cissé et Madické Kane il n’y a pas longtemps, en équipe nationale A pour renforcer l’effectif (Ndlr : face au Soudan, en Octobre 2018). Il y avait des joueurs qui étaient absents et il avait fait appel à nous pour combler le vide et apprendre aussi. Après les entraînements, on avait tenu une discussion pendant laquelle il m’avait expliqué beaucoup de choses. J’aurai peut-être eu une chance en équipe nationale A si j’avais bien enchaîné ma saison d’après Coupe UFOA / Wafu Cup qu’on avait gagné. Je travaille pour être appelé. Et l’heure arrivera un jour ins’Allah.», nous promet-il.

Etre fils d’un ancien joueur est parfois un lourd fardeau pour les jeunes footballeurs. Mais, du côté d’Assane, c’est plutôt une motivation qu’une pression, nous dit-il. Avoir un père qui a été capitaine du Jaraaf, une personne qui fait partie des sénégalais les plus titrés dans le championnat sénégalais est un plus. Cela me donne plus de motivation que de pression. Mon papa (Dame Mbodj) fut un ancien coach du Jaraaf. Ma maman est aussi une adepte du Jaraaf, et c’est elle qui préparait les repas des joueurs quand mon père avait les rênes de l’équipe ».

LA RÉSILIATION DE SON CONTRAT EN FINLANDE, SON AMBITION

Des essais concluants et non-concluants, Assane Mbodj en a connus. L’ancien joueur de Dakar Sacré Cœur aurait pu évoluer en Veikkausliiga (Ndlr : championnat de football de la Finlande), mais tout n’était pas réuni pour que le sénégalais fasse ses débuts en Europe. J’ai été trois fois à l’extérieur. En France, j’étais à Epinal dans le cadre d’un partenariat avec Dakar Sacré Cœur pour suivre la présaison. Pour mes essais en Norvège, je ne les avais pas réussis. Par contre, en Finlande, j’avais déjà signé le contrat depuis Dakar. Mais, il se trouvait que les termes du contrat que j’avais signé à Dakar n’étaient pas les mêmes que j’avais trouvé en Finlande (Ndlr : Ilves Tampere) et j’avais fini par résilier le contrat et de rentrer au pays », nous rappelle Mbodj.

Les conditions n’étaient pas réunies, et j’avais dit à Laye (Ndlr : Abdoulaye Ba, ex-joueur de Niarry Tally et du Jaraaf) que j’allais rentrer au Sénégal. Il était resté et moi, j’avais pris la voie du retour au bercail. Peu après, il avait compris que j’avais raison et il avait lui-même pris le chemin du retour après. », poursuit l’international sénégalais qui reconnait que le manque d’expérience fait souvent défaut dans les négociations de contrat. L’ambition de tout joueur local est de quitter le pays pour un championnat plus élevé, afin d’y monnayer son talent. Mais c’est aussi ça le football. Il faut toujours apprendre de ses erreurs et de ses expériences. Je continue à bien travailler pour retrouver un bon club avec un bon contrat. Dieu est Grand. J’espère revenir en force et faire plus qu’avant, une fois qu’on aura repris la saison qui est pour l’instant aux arrêts. »

Assane Mbodj, contre la Guinée-Bissau, Sept 2019 ©Muzi Ntombela

Formé à Dakar Sacré Cœur, mais confirmé au Jaraaf, Assane est bien taillé pour évaluer le niveau du championnat local sénégalais qui peine à présenter des équipes capables de franchir les premiers tours des compétitions africaines depuis 2004 (Ndlr : la dernière équipe à le faire était la Jeanne de Dakar dans les années 2004). Le championnat du Sénégal a un bon niveau. L’un de ses bémols est qu’il n’est pas assez structuré. Le public ne vient pas souvent, et cela impacte dans son image. Sinon, c’est un championnat qui a un très bon niveau. », soutient-il.

Pour Mbodj, il faudra améliorer l’organisation et que les sponsors et l’Etat pensent à aider le football local. On a besoin de leurs soutiens pour booster le football au niveau national. Des matchs comme Jaraaf – Pikine ont besoin du public parce qu’il y a de l’engouement et du jeu aussi. Ce genre de rencontres permettent aux joueurs locaux de se préparer à subir la pression une fois en Europe ou dans les pays arabes. Je me souviens d’une rencontre du Jaraaf à Casablanca (Ndlr : contre le Wydad en Champions League CAF).

A l’échauffement, le stade était vide. Mais quand les gradins avaient été ouverts au public, non, je n’avais jamais vu une chose pareille, c’était incroyable. Les supporters avaient bien assuré l’ambiance pour leur équipe. On avait perdu face à Wydad qui battait beaucoup d’équipes dans ce stade avec des scores fleuves. On avait perdu par deux buts à zéro. Au retour, on avait presque gagné, nul était les choix de l’arbitre qui étaient un peu louches, mais on allait nous en sortir.

Il faut aussi dire que si le public avait comme au Maroc, on allait peut-être avoir un autre dénouement », reconnait-il. « Je venais de quitter Dakar Sacré Cœur pour le Jaraaf où les résultats n’étaient pas probants. Je me souviens que j’étais dans une bonne forme et je venais de finir une bonne saison avec l’ASC Santhiaba (Ndlr : une équipe de Médina). Il y avait beaucoup de choses qui se disaient sur mon choix et il fallait prouver sur le terrain et justifier mon choix. C’est pourquoi je dis toujours que mon premier titre avec le Jaraaf fait partie de mes plus beaux moments dans le football local. L’équipe était restée presque huit (8) ans sans gagner le championnat et j’avais fait une bonne saison aussi. Pour ce qui est de la Champions League, on avait manqué la qualification à cause d’un manque d’expérience je dirais ».

LE CHOIX DU JARAAF…

Après donc des débuts réussis au Jaraaf, l’attaquant des Lions locaux a connu une saison difficile cette saison. Deux, c’est son nombre de rencontres disputées en toutes compétitions confondues. L’on se demande même ce qui se passait chez le jaraaf-man ? Je m’étais blessé pendant une longue période. J’avais contracté une blessure en sélection locale et je ne pouvais pas débuter la saison parce qu’il fallait suivre ma rééducation. A chaque fois que je reprenais la compétition, je rechutais à nouveau. Du coup, il fallait que je me fasse soigner et me rétablisse complètement. Voilà c’est la raison pour laquelle j’ai repris tardivement la saison. Je dirai que j’ai repris avant la période du couvre-feu national. », a révélé l’un des attaquants le plus prometteurs de la Ligue 2, il y a quelques années.

Assane Mbodj (Jaraaf en blanc) avec Chérif Diallo (Pikine) / Ligue 1

Je n’avais plus rien à prouver à Dakar Sacré Cœur, où j’avais fini mes cycles, après y avoir passé toutes mes catégories. J’avais besoin d’un club plus grand et plus huppé que DSC. Et quand le Jaraaf a voulu me faire signer, je n’avais pas hésiter. C’est le club que j’ai toujours aimé depuis tout petit. Mon papa (Ndlr : plusieurs fois Dame Mbodj, champion du Sénégal) fut le capitaine de ce club. Il a été son coach aussi et j’habite à la Médina en plus. Le jour de mon départ de Dakar Sacré Cœur, la première personne qui m’a appelé est Cheikh Seck (Ndlr : ancien gardien de but international sénégalais, actuel Président du Jaraaf). Il m’avait demandé de venir le rejoindre dans une place où il se trouvait avec mon papa qui est l’un de ses meilleurs amis. Il m’avait parlé avec un ton digne d’un langage père – fils. »

LA WAFU UFOA CUP

La WAFU Cup a relancé beaucoup de choses dans ma carrière. Ceux qui ne me connaissaient pas m’ont connu à travers ce tournoi et cela a aussi augmenté mon capital confiance et j’ai pris beaucoup de responsabilité depuis lors. », nous dit Assane Mbodj qui reconnait qu’il doit améliorer ses qualités physiques pour franchir un nouveau palier. Des clubs européens me voulaient, mais les négociations avec mon entourage n’avaient pas abouti. Il y avait des clubs français et marocains parmi les courtisans, mais c’est aussi comme ça avec le destin. Je voulais y aller et j’y tenais vraiment, mais les choses n’étaient pas tirées au clair et je suis resté. En tout cas, le moment venu, je partirai insh’Allah. », nous a fait savoir Azou comme l’appellent les intimes.

Equipe nationale A’ du Sénégal, médaille d’Or du WAFU CUP 2019

Frangin du défenseur international sénégalais, Mamadou Mbodj, Assane a pris du plaisir à jouer avec ce dernier sous les couleurs de Dakar Sacré Cœur. Et ces moments, il les garde encore dans un coin de sa tête. C’est parfois rare de voir des frères footballeurs dans une même équipe, surtout qu’avoir un papa qui a aussi été footballeur. J’ai pris du plaisir à jouer avec mon frère Il (Mamadou) jouait derrière, et il profitait de sa position pour me dire certaines choses (rires) en me replaçant. Mais c’est parce qu’il connaissait mon niveau qu’il me le disait. Et c’est quelqu’un de très positif. Je prie pour qu’il continue à aller plus haut et à réaliser une belle carrière. », souhaite-t-il à son frère qui défend les couleurs de l’actuel deuxième du championnat azerbaïdjanais, Neftchi Baku : 37 points après 20 journées.

LA REPRISE DE LA LIGUE 1 CETTE SAISON…

Joueur du Jaraaf (2e, 21 points), Assane se place avec son équipe à la deuxième place du championnat national, derrière Teungueth Football Club (33 points), obligé de suivre les règles établis par le gouvernement sénégalais, suite à la montée spectaculaire de l’épidémie du Coronavirus dans le pays. L’on se demande comment le vainqueur de l’UFOA / WAFU Cup gère la situation sur le plan individuel et collectif ? De mon côté, je ne peux que m’entrainer pour que la reprise ne me surprenne.

Par contre, je suis un peu réticent par rapport à la reprise, car, les cas devaient être en baisse. Vu la situation des cas en hausse, je pense que ça sera difficile de reprendre la saison, et je ne pense pas qu’on reprendra de sitôt. », dit-il, avant de nous donner son point de vue par rapport à la stratégie à prendre pour sauver la saison. Mais, quoi qu’il advienne, une décision devra être prise.

Il faut dire aussi qu’annuler la saison sachant qu’il y à une équipe qui domine le classement ou priver la montée aux deux premiers de la Ligue 2 sera aussi également compliqué à comprendre par ces derniers. C’est pourquoi je dis que toute décision prise avec la situation actuelle arrangera les uns et ne sera pas favorable aux autres. Il faut trouver de l’équilibre en tout cas. », nous apprend le champion du Sénégal qui appelle les jeunes à ne pas très tôt abandonner les études pour se consacrer uniquement au football. Cumuler le sport et les études est une bonne chose.

Assane et Moutarou Baldé, face à la Guinée-Bissau ©Muzi Ntombela

J’aurai souhaité continuer mes études, mais il arrive toujours ce moment où on est appelé à choisir l’un des deux. C’est pourquoi il faut toujours faire les deux, jusqu’à ce que ce moment arrive. », insiste le joueur du club de la Médina qui n’a pas eu le temps de bien reprendre ses jambes, après une blessure qui l’a longtemps éloigné des pelouses. Ma saison est négative si je dois me permettre de le dire ainsi. J’ai joué deux rencontres lors de la phase aller, toutes en deuxième mi-temps. Malheureusement, c’est face à l’US Gorée que je me suis encore senti mal. J’avais rechuté et c’était difficile. », a reconnu l’attaquant du Jaraaf de Dakar.

Jeune (27 ans), Assane Mbodj pense aussi à son après-carrière. Le sénégalais rêve de devenir un entraineur une fois qu’il aura raccroché les crampons, nous révèle le joueur qui nous a rappelé que l’ancien sélectionneur des Lions locaux est celui qui lui a le plus marqué sur le plan tactique. « Tous les entraineurs qui m’ont une fois entrainé m’ont marqué, mais celui que je trouve comme étant le plus tactique est Moustapha Seck (Ndlr : actuel coach de SONACOS, en Ligue 2 sénégalaise). », nous apprend-il. Mon rêve est de devenir un entraineur après ma carrière. C’est quelque chose qui me plait le plus. Et j’aimerai le faire dans le futur. », conclu-t-il.

Chérif Sadio

Reporter indépendant.

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