Interview / Edouard Mendy : « Il ne nous manque pas grand-chose »

Le portier international sénégalais Edourad Mendy est revenu avec nous sur la dernière Coupe d’Afrique, sur son choix du Sénégal au détriment de la Guinée-Bissau, sa blessure à la dernière Coupe d’Afrique, sur son passage à l’OM, sur son avenir avec Rennes et sur le futur de la sélection du Sénégal.

« Je suis confiné chez moi. Comme tout le monde, il faut s’adapter. On n’a pas le choix. Il faut rester chez soi, respecter les gestes barrières et les consignes préventives et continuer à s’entretenir pour être prêt pour la reprise des entraînements et du championnat.

J’ai des programmes quotidiens. En plus, j’ai du matériel chez moi, ce qui me permet de continuer à travailler et de profiter de ma famille aussi. Le staff a préparé un programme spécifique pour chaque joueur et chacun essaie de respecter le programme à la lettre.

On était dans une bonne dynamique avant la trêve. On doit se préparer pour finir dans une bonne place en fin de saison. L’objectif pour l’instant est de jouer les matchs comme avant. Une fois dans la dernière ligne droite, on essaiera de switcher d’autres objectifs.

C’est compliqué par rapport à mon poste. On a un coach qui nous envoie des entraînements spécifiques parfois adaptés au matériel que nous avons à la maison. Des séances qui, quand on a par exemple un mur, on peut taper dessus pour les prises de balles. J’ai aussi un jardin chez moi et j’en profite aussi pour bien travailler ma détente. », nous a fait savoir l’ancien gardien de Reims.

Passé du plus bas au plus haut niveau, Edouard Mendy est le prototype du footballeur modèle. Il a connu la descente avant la montée. Et le Lion garde toujours en tête ses périodes de galère.

« J’ai vécu d’énormes difficultés : le chômage, partir du centre du Havre, aller là où on vous dit qu’au niveau du contrat, qu’on ne pourra pas vous donner ceci ou cela, entendre que vous ne serez pas retenu parce qu’il y a déjà beaucoup de gardiens etc. J’en ai eu jusqu’à mon année de chômage, avant Marseille.

Quand on lui demande le pourquoi du choix de devenir gardien de but ? Edouard nous répond : Au départ, je ne voulais pas être gardien, je voulais être sur le terrain, marquer et faire des passes. Mais sur le terrain, je n’étais pas trop fort, contrairement dans les buts où j’arrêtais tout. Le coach m’a donc mis dans les cages, puis le Havre est venu me chercher pour son centre de formation. Et c’est comme ça que ça a commençait. ».

Après, j’ai aimé Tony Silva qui a été l’un des premiers gardiens noirs en France. Ce qui est très important pour nous autres gardiens de buts noirs ou d’origine africaine en France qui sommes arrivés après. J’ai beaucoup aimé Vincent Enyama et Thibault Courtois. J’aime beaucoup ce que fais Alisson, De Gea. J’aimais aussi regarder Van Der Sarr et Peter Cech. », rajoute le portier sénégalais.

Auteur de 13 clean-sheets en 33 matchs en toutes compétitions confondues cette saison, Edouard Mendy garde une grande côte en Europe, où il figure parmi les meilleurs gardiens portiers des cinq grands championnats. Mais le Lion ne pense pas encore à un départ. Dans ma tête, il n’y qu’une idée : reprendre avec Rennes.

Je suis arrivé il y a à peine quelques mois. Je m’inscris déjà dans un projet qui est là et pour l’instant, je pense à grandir avec ce projet et à continuer à engranger de l’expérience et à continuer avec Rennes.

La Coupe d’Afrique 2019, sa blessure

« J‘étais en plein transfert et je disputais une grande compétition internationale qui est la Coupe d’Afrique des Nations. Je peux dire que c’est arrivé au mauvais moment. Dès les préparations, on sentait qu’on pouvait bien gagner cette compétition.

C’est ce qui devait m’arriver et c’était mon destin. Je l’ai accepté et je continue d’avancer aujourd’hui. J’avais déjà eu ce genre de blessure auparavant. Il fallait que Alfred s’échauffe pour ne pas perdre du temps. Au niveau des doigts, je suis hyper relaxe et je sentais déjà que mon doigt était cassé.

Le docteur pensait que ce n‘était pas grave, je lui avais dit que c’était cassé. Quand je suis parti dans les vestiaires, il a vu que mon doigt commençait à avoir du bleu. Après le match et la qualification en 8^e de finale, je suis parti à l’hôpital.

Ils voulaient m’opérer là-bas, j’ai refusé parce que j’avais déjà un docteur à Reims qui était bon. Je suis parti et je me suis fait opéré deux jours après. J’étais en période de transfert comme je le dis. Je savais que des clubs allaient demander mon indemnité à Reims et que d’autres allaient se retirer.

Et je remercie vraiment le Stade Rennais. Ses dirigeants m’avaient très tôt rassuré que ma blessure n’enlèverait rien à mon transfert. »

La finale de la Coupe d’Afrique des Nations Egypte 2019

« La finale ?  C’est déjà dur de le regarder de l’autre côté. On savait que les amis allaient se donner à fond. Certes, ma blessure m’a écarté, mais même si j’étais sur le banc, j’allais pousser les amis en tant que supporter.

On avait cet esprit de revanche par rapport au match de poule qu’on avait perdu. On est dans un groupe et on sait que tout le monde ne jouera pas. Et c’était dur de prendre un but comme ça en début de match, un but qui les confortait dans leur plan de jeu.

On ne peut rien reprocher à Alfred Gomis sur le but qu’on a pris. C’est difficile pour un gardien d’arrêter un tel ballon. La balle a été contré et sa trajectoire a été changé. Comme je le dis, il faut apprendre de cette défaite et avancer.

Les algériens voulaient très tôt marquer pour tout fermer derrière. Ils savaient qu’ils étaient bons défensivement. Nous avions fait ce que nous pouvions, mais nous n’avons pas pu y arriver.

C’est dur de dire qu’on aurait pu mieux faire que d’autre, mais il faut tourner la page et penser à aller chercher la prochaine en se servant de cette finale comme exemple.

Ce qui manque à la tanière

Il ne manque pas grand-chose. On a été en finale, on a marqué beaucoup de buts et en a encaissé très peu. Ce qui est déjà positif. Le coach a fait jouer presque tout le monde. Je dirais que nous avons tous trouvé du temps de jeu.

Il ne manque vraiment pas grand-chose à cette équipe que nous avons. Il faut garder ce match contre l’Algérie comme un souvenir et avancer.

« Le Sénégal ? J’y vais souvent pour voir la famille. Maintenant, c’est la famille qui vient à l’hôtel quand j’y vais en sélection. Mais j’ai de bons rapports avec le Sénégal », rappelle Mendy, accueillis en pompe à Dakar avec ses coéquipiers, au retour de la dernière Coupe d’Afrique.

« Hors terrain de football, c’est mon meilleur souvenir. Je pense qu’aucun joueur n’avait déjà vécu une situation pareille. On pensait qu’il y allait y avoir 3000 personnes, mais il y avait tout le Sénégal.

En sélection, il y a de la bonne ambiance. Tout le monde s’entend bien et je pense que c’est ce qui nous a permis d’aller loin. »

Le cas Lys Mousset Mendy

Cousin à Lys Mousset Mendy, Edouard nous parle de ses rapports avec le probable futur Lion et son envie de suivre ses pas en regagnant la sélection du Sénégal. « Lys, je parlais du Sénégal avec lui depuis. C’est mon cousin. On a grandi dans le même quartier.

Il n’a pas été en équipe de France de jeune pour rien. Tous ces buts qu’il marque montre que c’est un joueur très talentueux. Il a envie de jouer pour le Sénégal. Donc, tout est positif. », révèle Edou à propos de l’attaquant de Sheffield United.

La concurrence en sélection

La concurrence au poste de gardien de but est saine entre nous. Je connais Abdoulaye Diallo depuis plusieurs années, un super mec. Se retrouver ensemble en sélection est plutôt une retrouvaille. J’ai découvert Alfred Gomis l’année dernière. Lui aussi, c’est un très bon gardien de but.

On a la chance d’être dans une génération où il y a de bons gardiens de but. Tout le monde sait que Abdou (Diallo) est un bon gardien et il l’avait démontré lors de la CAN 2017. En sélection, le discours du coach est clair : il n’y a pas de titulaire indiscutable dans les postes.

Celui qui joue doit répondre présent. Tout le monde est d’un niveau homogène et on a la chance d’avoir Tony Silva qui est l’ancien gardien de la sélection et qui est de bon conseil pour nous tous.

La Guinée-Bissau

« La Guinée Bissau est le pays d’où mes parents sont originaires. Je ne m’y suis jamais rendu. C’est un pays qui fait partie de mon histoire aussi. », dit-il. Le choix du Sénégal ? Ce n’est même pas un choix. C’était une chose de logique pour moi.

Quand le coach est venu me voir lors de mon deuxième match de Ligue 1 pour me dire qu’il voulait me sélectionner, j’étais très content, et je n’avais pas hésité. J’ai toujours eu de l’attachement pour le Sénégal depuis tout petit.

Lors de la Coupe du Monde 2002, le Sénégal a fait vibrer toute l’Afrique et je disais depuis lors qu’une fois devenu football de haut niveau, je jouerai pour le Sénégal. Ce que je suis en train de faire. Aujourd’hui, le plus dur est d’y rester. C’est encore plus dur d’y jouer, il faut donc être fort en club pour garder sa place en sélection. »

La saison actuelle, les clean-sheets, son avenir …

« Les clean sheets ? On parle des gardiens, mais c’est un travail d’équipe. Le Stade de Reims avait de très bons défenseurs.

Je suis le dernier rempart et je ne fais que mon travail à mon tour. Aujourd’hui, je suis dans une équipe (Rennes) ou on marque beaucoup pour encaisser moins. On est la deuxième meilleure défense de Ligue 1 derrière mon ancien club (Reims) et le travail continue. »

Ma saison à Rennes est pour l’instant positive. L’heure n’est pas au bilan parce que la saison est en cours. Malheureusement qu’on a été éliminé en Coupe, mais on est bien classés en championnat, où nous sommes parmi les cinq premiers à dix journées de la fin. On continue de travailler pour garder une bonne place et bien finir la saison. »

L’Olympique de Marseille

Passé par l’Olympique de Marseille, Edouard garde encore des souvenirs de la cannebière, où il a pu retrouver ses ails, après un long moment de chômage. Par contre, son objectif n’était pas de rester à l’OM, mais d’en faire un tremplin pour se relancer.

« Marseille ? Non, mon année à là-bas était juste pour me relancer. Trouver Marseille après ma période de chômage était une bonne opportunité. J’y allais pour m’entrainer avec de grands joueur, apprendre à leurs côtés et progresser.

Mon objectif était de trouver du temps de jeu avec la réserve et de rebondir aussi vite ailleurs. Je me suis retrouver en Ligue 2. Pour une fois, j’avais l’occasion de pouvoir rester à l’OM, aller au Havre, Troyes ou à Ajaccio.

J’ai signé au Stade de Reims parce que pour moi, c’est le club qui avait le meilleur projet. Et aujourd’hui je suis en Ligue 1. », nous fait savoir l’ancien portier de Cherbourg.

Pour son avenir, le Lion soutient qu’il se voit en Bretagne en ce moment. Je me sens bien à Rennes. L’idée est de progresser avec ce projet. Beaucoup de gens dans le club me donnent confiance. Je suis très bien ici. Ma seule perspective en ce moment est le Stade Rennais.

Dialy Ndiaye, Boulaye Dia

Après l’annonce de son départ, le Stade de Reims avait vu en Dialy Kobaly Ndiaye, l’un de ses successeurs. Edouard n’avait pas manqué de parler du bien du jeune portier sénégalais, vice-champion d’Afrique et huitième de finaliste.

« Dialy, un niveau du poste de gardien de but en sélection, c’est l’avenir. Très à l’aise balle au pied, dans les airs, sur sa ligne etc. Quand j’ai reçu le coup de fil du Directeur Sportif de Reims me disant qu’il allait le faire signer, j’étais en partance pour la sélection.

J’étais très content pour lui et je lui avais dit que c’était un bon gardien de but. Tout le monde sait qu’en Afrique, les conditions d’entrainement sont un peu difficiles.

En Europe, il aura l’occasion de suivre un apprentissage approfondi. Il a la possibilité de continuer à progresser et à exploser tout son talent. A son arrivée, je lui avais dit que les choses allaient prendre du temps et qu’il ne se presse pas.

Même s’il n’a pas le temps de jeu qu’il aurait souhaité en réserve, mais son heure viendra. Mais j’ai de bons retours sur lui du coté de Reims

« Boulaye Dia ? Dès le premier entrainement avec nous, je me suis demandé où il était, lui ? Il vient de loin. Il n’a pas eu un parcours facile et il a faim. Il était venu pour intégrer la réserve, mais il a prouvé pour être en pro aussi vite possible. 

Il a profité de son temps de jeu pour devenir un titulaire indiscutable. Ce qu’il fait aujourd’hui n’est pas une surprise de mon point de vue. Je pense que c’est aussi normal qu’on parle de lui en sélection, c’est normal.

Souvent cité dans les autres championnats, Edouard ne semble s’attirer vers un départ. « Il y a beaucoup de bons championnats, mais la Premier League m’attire depuis très longtemps. Mais il y a le championnat espagnol et allemand qui sont très bons., nous dit-il.

Rennes, c’est le meilleur public de France. C’est énorme et pour nous et pour les adversaires, c’est difficile à vivre 90 minutes. On a la chance d’avoir un meilleur public et de profiter d’eux.

On a marqué beaucoup de buts dans les dernières minutes et c’est aussi grâce à la force du public qui nous poussait toujours. Je me sens bien ici et je m’inscris bien dans ce projet. », a résumé le portier des vice-champions d’Afrique.